On parle beaucoup d’alimentation durable, mais qui regarde vraiment dans les coulisses de la filière ? Quand les chaînes d’approvisionnement dysfonctionnent, même les meilleures intentions restent à l’arrêt.
Le secteur de l’agroalimentaire parle volontiers de durabilité, mais les actions concrètes tardent à suivre. Une étude menée autour du Brazilian Roundtable on Sustainability Livestock (BRSL) révèle un décalage préoccupant.
Depuis 2009, cette plateforme réunit éleveurs, abattoirs, industriels et institutions publiques autour d’objectifs partagés. Malgré des engagements sincères, les transformations sur le terrain restent timides, notamment chez les plus petits acteurs.
« L’alimentation durable fait l’objet d’échanges, mais peu d’évolutions tangibles sont observées », résument les chercheurs. Ils pointent surtout l’exclusion des éleveurs indépendants, pourtant au cœur de la production.
Un territoire immense, des acteurs trop dispersés
Le Brésil fait figure de géant géographique : plus de 8,5 millions de km² séparent ses extrémités. Résultat : les acteurs du BRSL sont souvent trop éloignés pour échanger efficacement. La distance complique les rencontres physiques, limite les coopérations et accentue les écarts d’accès à l’information.
Les petits producteurs, notamment dans les zones rurales, se retrouvent isolés. Ils ne participent ni aux décisions, ni aux projets. Dans ces conditions, les chaînes d’approvisionnement peinent à fonctionner comme de véritables chaînes.
Un autre obstacle identifié concerne la diversité des profils engagés dans le BRSL. D’un côté, des multinationales bien structurées exportent dans le monde entier. De l’autre, des éleveurs modestes, souvent peu connectés au langage ou aux méthodes de la transition durable.
Cette distance culturelle freine la compréhension mutuelle. Les termes techniques du guide pratique restent flous pour certains. Les valeurs et priorités diffèrent trop pour bâtir une stratégie partagée. La cohésion du BRSL en souffre directement.
Un manque de lien, d’information… et de confiance
L’étude met en lumière trois conséquences lourdes. D’abord, une faible cohésion, même entre partenaires habituels. Beaucoup ne se connaissent pas vraiment, bien qu’ils dépendent les uns des autres. Ensuite, l’information ne circule pas également : certains reçoivent tout, d’autres rien.
Enfin, le climat de défiance entre éleveurs et abattoirs plombe toute dynamique collective. La négociation des prix reste au cœur des relations, ce qui relègue la durabilité au second plan. Les acteurs qui s’investissent dans le BRSL peuvent ainsi se heurter au scepticisme ou à l’indifférence des autres.

Repenser la proximité pour relancer le changement
Les auteurs de l’étude en tirent une leçon simple : la transition durable passera aussi par des chaînes d’approvisionnement mieux connectées. Il faut reconstruire de la proximité, dans toutes ses dimensions : géographique, culturelle, relationnelle.
Cela suppose des actions ciblées : outils de médiation, représentations équilibrées, transmission d’informations adaptées. Les États ont également un rôle à jouer. Ils doivent s’impliquer dans les dynamiques internes des chaînes et pas seulement poser des exigences externes. Sinon, l’alimentation durable risque de rester un concept… sans conséquence concrète.
Article basé sur un communiqué de presse reçu par la rédaction.